dd5-un-pretre-nainCela fait quelques jours que je suis sorti de ma retraite, que j’ai rejoint le monde des vivants et je veux déjà rentrer chez moi. Mais chez moi, c’est un vieux temple à moitié en ruine qui doit normalement héberger une relique très ancienne. Et malheureusement pour cette relique, j’ai été un bien mauvais gardien.

A 20 ans, alors que je vivais de petits travaux, j’ai eu une sorte d’illumination, je devais trouver un sens à ma vie. La prêtrise me semblait alors une bonne idée. Après quelques années, à 35 ans, je fus enfin reconnu comme prêtre accompli et mais je n’ai pas vraiment le droit de choisir mon affectation, je n’avais le choix qu’entre un camp militaire enfoncé profondément dans les territoires hostiles dont le dernier prêtre avait été dévoré vivant, ou la garde d’un vieux temple en ruine dont la plupart des Nains ignore l’existence. Ne me voyant pas guerroyer, j’ai décidé de me rendre au temple pour garder une ancienne relique, la bague des anciens rois qui orne le tombeau d’un des premiers rois nains.

Là bas, je rencontrais l’ancien gardien, un vieux prêtre sans âge mais d’une force redoutable. Car oui, garder la relique signifie également la protéger des éventuelles pilleurs. Et si la relique est suffisamment sacrée et intouchable pour les nains pour être tombé dans l’oublie, elle est également suffisamment précieuse et inestimable pour que sa légende soit constamment vérifiée par des petits brigands. Moi qui voulais éviter les combats, voilà que je me retrouvais apprenti gardien avec des heures d’entraînement au bouclier et la masse d’arme tous les jours.

L’entraînement avait débuté assez sagement, Blutel, mon mentor, m’avait demandé de briser une bûche de bois avec ma masse d’arme. Chaque jour, je passais plusieurs heures à frapper de toutes mes forces le rondin pour finalement le briser après plusieurs semaines. Dès le lendemain, une nouvelle bûche attendait et mon maître me fit une démonstration en détruisant le rondin d’un seul coup.

Après quelques années, j’arrivais à rivaliser en agilité et en rapidité avec Blutel, mais sa force était toujours impressionnante et avait souvent raison de moi lors des entraînements. Si je peinais moins à détruire la bûche, il me fallait toujours plusieurs jours le temps de l’affaiblir.

Petit à petit un autre entraînement s’imposa, celui des sorts. En tant que prêtre, je devais maîtriser quelques sorts de base pour repousser d’éventuels assaillants et éventuellement me soigner. Étrangement, je trouvais cet aspect de mon rôle de gardien beaucoup plus facile, même si la fatigue engendrée était identique voir supérieure à un entraînement aux armes. Un sort particulier m’amusait beaucoup, il me permettait de tripler la puissance de ma voix et de faire bouger les flammes autour de moi. Mon maître m’enseignait que souvent faire peur suffisait pour gagner le combat, les brigands amateurs renonçaient assez facilement.

Au bout de 20 ans, je n’avais toujours pas vu la relique. C’était le contrat passé avec le gardien en place, je devais le vaincre pour un jour poser mes yeux dessus. La maison du gardien bouchait l’entrée du tunnel d’accès au temple, cette disposition nous permettait d’empêcher quiconque d’entrée sans pour autant nous obliger à faire des tours de garde. Quelques chiens de chasse très bien dressés nous avertissaient en cas d’intrusion.

Un soir, alors que Blutel était parti chasser dans la forêt au pied de la montagne, deux voleurs tentèrent de pénétrer dans la maisonnette. Une chose est certaine, le nez d’un humain est beaucoup plus friable d’une bûche de bois. Le premier, épaté par ma force, se retourna et partit en courant. Le second fut un peu plus téméraire et arriva à me repousser à l’intérieur de la maison, mais je chargeais, bouclier en avant et le mis à terre. Au moment ou ma masse allait s’abattre sur son crâne, un coup violent m’envoya voler au loin. Un homme immense se tenait là, une massue à la main. Le brigand se releva et se cacha derrière le nouveau venu.

Il était grand et imposant, mais se déplaçait relativement rapidement compte tenu de sa taille. S’il avait été seul, j’aurais pu le contenir jusqu’à l’arrivée de Blutel, mais avec son comparse, j’avais beau jouer à domicile, j’étais en infériorité numérique. L’idée première était donc de rétablir l’équilibre en supprimant le plus petit des deux. Faisant mine de m’intéresser au plus grand, je voyais du coin de l’oeil l’autre se déplacer dans mon dos. Après quelques secondes d’attente, je me retourne brusquement en charge sur le brigand, bouclier en avant. Je le coince contre le mur de la maison avec un choc si violent que son crâne frappe la pierre et le corps devient inerte.

La victoire est de courte durée, la masse du golgoth me cueille au passage, m’envoyant voler quelques mètres plus loin. Étalé sur le dos, sonné, je le vois brandir sa masse au dessus de sa tête. Je lève mon bouclier pour me protéger. L’impact est si violent que je ressens une vive douleur dans le bras. Le second impact fendille le bouclier, tandis que le troisième le brise. Mes yeux commencent à se fermer, je sombre dans l’inconscience. Je dois pourtant me relever pour protéger le temple. Alors que j’entends des chiens arriver au loin, le quatrième et dernier coup est dévié in-extremis par le seul fragment restant de mon bouclier mais il parvient à m’assommer.

Je me réveille, il fait jour, c’est le matin. Alors que je me dirige vers la maison comme si je venais de passer la nuit à la belle étoile après une soirée de beuverie, je réalise que mon état n’est pas lié à l’alcool, mais au combat de la veille. Je me réveille complètement dans un sursaut pour finalement découvrir le spectacle épouvantable. La meute de chien avait été complètement décimée et Blutel baignait dans son propre sang, mort. Aucun trace de l’humain. Dans la maison, une traînée de sang au sol descend dans le tunnel d’accès au temple. Je me précipite vers la chambre funéraire pour y trouver le cadavre de l’humain, étendu de tout son long, la main tendu vers un piédestal vide.

J’ai passé la journée à creuser une tombe pour Blutel à côté des tombes des anciens gardiens, et à rassembler les chiens dans une fosse commune. Après avoir évacué le cadavre de l’humain, j’ai rassemblé mes affaires et le collier de Blutel, mis le feu à la maison pour boucher l’entrée du tunnel avec les gravas. J’ai regardé la maison brûler pendant plusieurs heures et quand il ne resta plus qu’un tas de cendre, je me suis retourné et j’ai commencé à descendre la montagne.

Je devais retrouver cette relique.

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